Quelques jours avant l’ouverture du championnat du Monde de Formule 1 2021 où la France sera représentée par l’équipe Alpine F1 Team, nous avons décidé de vous raconter, en trois parties, l’histoire d’une marque automobile française créée par Jean Rédélé en 1955.
Chefs & Bolides suit l’équipe Alpine F1 Team (ex Renault F1 Team) depuis la fin de saison F1 2020 et continuera de le faire durant toute la saison 2021. Le programme d’Alpine en sport-automobile va monter en puissance, avec l’arrivée de la marque dans le championnat du monde de Formule 1 sous le nom d’Alpine F1 Team, sans oublier la montée dans la catégorie reine (Hypercar) du championnat du monde d’endurance FIA WEC, sous le nom Alpine Endurance Team.
Alpine c’est l’histoire d’une marque, mais c’est aussi une histoire d’hommes avant d’être, aujourd’hui, l’histoire d’un renouveau. Le nom et l’ADN d’Alpine sont ancrés dans la légende automobile.
Une famille « Renault »
Jean Rédélé est le fils aîné de Madeleine Prieur et d’Emile Rédélé, concessionnaire Renault à Dieppe et ancien mécanicien de Ferenc Szisz, le premier « pilote d’usine » de Renault Frères, vainqueur du Grand-Prix de la Sarthe en 1906 au Mans et second au Grand-Prix de l’ACF à Dieppe en 1907.
Emile Rédélé avait été embauché par Louis Renault lui-même au tout début du XXème siècle. À l’issue de la Première Guerre Mondiale, à la demande de Louis Renault, le jeune Emile Rédélé s’installe à Dieppe et y ouvre la concession Renault, rue Thiers. Deux ans plus tard, nait Jean-Emile-Amédée Rédélé, le 17 mai 1922. Après de bonnes études en Normandie, Jean Rédélé passe son Baccalauréat pendant la Seconde Guerre Mondiale et fait la rencontre de personnages aussi différents qu’Antoine Blondin, Gérard Philipe ou Edmond de Rothschild. Il se destine à être Sous-préfet avant de bifurquer dans son orientation et d’intégrer HEC à Paris.
Il va y acquérir une double compétence économique et commerciale et en sort diplômé en octobre 1946, non sans avoir envoyé un rapport de stage à la Direction Générale de Renault. Jean Rédélé y affirme quelques points de vue novateurs sur la stratégie commerciale du Premier constructeur national avec suffisamment de conviction pour qu’il se fasse convoquer à Boulogne-Billancourt par Pierre Dreyfus, le PDG de Renault… Pour l’aider à mettre ses idées en action, il est nommé Concessionnaire officiel à Dieppe en succession à son père.
Jean Rédélé a vingt-quatre ans et est, dès lors, le plus jeune concessionnaire automobile de France. Il se lance dans la compétition automobile en 1950, estimant que « la course est le meilleur banc d’essai pour les modèles de série et que la victoire est le meilleur argument de vente ». C’est naturellement la toute nouvelle 4 CV Renault qu’il choisit comme moyen promotionnel.
Jean Rédélé, champion de course automobile
Le 24 juillet 1950, il s’engage au « 1er Rallye de Dieppe ». Sur ses terres et face à quarante autres concurrents, il impose sa 4 CV à la première place devant les 203 Peugeot et autres Salmson plus puissantes. Cette victoire est saluée par la Presse et la Régie Renault qui lui propose, dès 1951, de courir le XXIème Rallye Monte-Carlo sur une « 1063 », la version « spéciale course » de la 4 CV. Il termine quatrième de classe, puis second au 2ème Rallye de Dieppe. Sa carrière de pilote est lancée. Premier au 1er Rallye de Dax, cinquième au Rallye du Dauphiné, troisième au terrifiant Marathon de la Route qui se déroule entre Liège, Rome et Liège, troisième encore au Tour de France Automobile, il termine sa saison en remportant le Tour de Belgique.
Jean Rédélé et son co-pilote Louis Pons participent aux très exigeantes « Mille Miglia », une course de mille cinq cents kilomètres disputée sur route ouverte, en continu, entre Brescia, Rome et Brescia, en Italie. Ils gagnent leur catégorie en battant tous les records, laissant leurs poursuivants à plus d’une heure derrière eux à l’arrivée.
Engagé officiellement par Renault aux 24 Heures du Mans 1952, Rédélé sur sa 4 CV est en tête de catégorie le dimanche à treize heures soit deux heures avant l’arrivée quand il doit abandonner. Il prend sa revanche au Tour de France Automobile où il termine troisième au classement général, un exploit compte tenu de la relative modestie de sa voiture.
En 1953, Rédélé et Pons gagnent leur classe aux « Mille Miglia », toujours sur 4 CV 1063 mais Jean Rédélé piaffe d’impatience de piloter la « Renault Spéciale » commandée en Italie. Dès sa première sortie, Rédélé gagne le classement général avec sa « Renault Spéciale ». Il devance deux Jaguar et une Porsche.
En 1954, Rédélé et Pons s’imposent aux « Mille Miglia » qui deviennent leur épreuve fétiche, puis au Critérium des Alpes. « C’est en sillonnant les Alpes à bord de ma 4 CV Renault que je me suis le plus amusé. J’ai donc décidé d’appeler mes futures voitures Alpine. Il fallait que mes clients retrouvent ce plaisir de conduire au volant de la voiture que je voulais construire » rapportait Jean Rédélé.
À l’issue d’une saison 1954 aussi prodigieuse que celle de 1953, Jean Rédélé est désormais considéré comme un grand pilote, compliment qui lui va droit au cœur même si, dans son for intérieur, il sait qu’il va bientôt devoir choisir entre piloter ses autos ou piloter son entreprise.
En 1955, à peine Jean Rédélé reçoit-il sa « Rédélé Spéciale », seconde voiture produite expressément pour lui en Italie, il termine second des « Mille Miglia », course remportée par Jean-Claude Galtier sur « Rédélé Spéciale.
Ce doublé décide Jean Rédélé à créer sa marque : elle s’appellera « Alpine » et sera basée à la fois à Paris, rue Forest et à Dieppe, avenue Pasteur.
Source Alpine – Photos © fournies gracieusement par Alpine.