Arborescence est un restaurant situé près de Lille, à Croix, c’est aussi un théâtre, un souvenir en acte, un rêve. D’ailleurs, les mots que Félix et Nidta Robert emploient pour décrire leur établissement puisent davantage dans le lexique de la poésie que de la cuisine : lumière, ombre, imaginaire. Car bien qu’on y mange et qu’on y boive, on y pense aussi. La cuisine servie chez Arborescence est celle d’un geste d’artistes, où l’onirisme rencontre la plus haute technique.
Dès l’entrée, le ton est donné. Les menus, écrits sous la forme d’énigmatiques haïkus sur des languettes de papier, sont suspendus dans les airs et flottent au vent, tel un nuage de délices. À l’intérieur, le couloir sombre, au sol souple, est décoré des croquis du Chef. On y aperçoit, au hasard, quelques-uns des plats qui seront servis. Rogue de truite, raviole végétale, saint-pierre et fraises… L’appétit se creuse, l’esprit s’aiguise. L’accrochage change au fil des saisons. Une fois en salle, la lumière nous éblouit ; comme par magie, le spectacle des sens peut commencer.
Peu de restaurants procurent autant la sensation d’être transformés, au sens profond, comme parfois le font les œuvres d’art. Il y a de cela chez Arborescence. Y entrer, s’y asseoir, c’est accepter de s’immerger dans un monde qui nous bouleverse. En repartant, les papilles et l’âme en sortent éveillées, restaurées au sens premier du mot.
Le chef Félix Robert aime la fragilité. Fils d’une professeure de français et d’un professeur aux Beaux-Arts, on ne s’étonne pas de retrouver autant de poésie dans ses plats. Il grandit à Steenvoorde, dans le nord de la France, en face d’un éleveur de pigeons auquel il finira par rendre hommage dans l’un de ses plats, Le pigeon et son ombre. D’abord Chef pâtissier chez Alexandre Gauthier, à la Grenouillère, Félix Robert a parfait sa formation en travaillant les poissons et les sauces chez les Troisgros et chez RyuGin, à Tokyo, au Japon. Pendant toutes ces années, l’idée d’ouvrir son propre restaurant ne le quitte pas. La rencontre de Nidta Prathum, au lycée hôtelier du Touquet, ne fera que renforcer ce désir. Âgé de trente ans à peine, il ouvre Arborescence en 2022 et obtient une étoile au Guide Michelin en 2023.
Pour décrire sa cuisine, Félix Robert n’utilise jamais les mots fusion ou melting pot. Il préfère parler de rencontre. Sa pensée poétique l’entraîne vers une cuisine de l’imaginaire, où les plats créés sont un tableau de goûts, de couleurs et de cuissons.
Le travail extrême sur les textures en dit long sur sa maîtrise de la composition et de l’esthétique, sans grandiloquence. Entre la dentelle de poutargue ou un lieu jaune et ses nuances, entre un veau à l’horizon ou un argousier bord de mer à l’écume d’algues iodées, on a le sentiment de découvrir son art autant par la bouche que par l’esprit. De l’entrée au dessert, les associations les plus délicates forment comme un petit jardin à engloutir.
Nidta Robert Prathum, Cheffe sommelière
Née en Thaïlande, à Uttaradit, dans le nord du pays, Nidta Robert Prathum vit en France depuis 2008. Orpheline à l’âge de quatorze ans, elle décide de se jeter dans les études pour se donner les moyens d’un grand destin – ce qu’elle réussira. Sans gravité, mais avec un sérieux qui force l’admiration, elle étudie avec acharnement, remporte une bourse d’études du gouvernement thaïlandais et s’expatrie en France où elle rencontre Félix Robert à l’école hôtelière du Touquet. L’histoire d’Arborescence est née là, dans cet entre-deux entre la Thaïlande et la France.
Ayant grandi sur une ferme en polyculture, où l’on cultivait autant le riz que de nombreuses variétés de fruits, elle apprend tôt à respirer et à goûter les plantes, racines et fruits qui l’entourent. Cette mémoire minutieuse la prépare dès l’enfance à l’apprentissage de la sommellerie, qu’elle effectuera en France. Ce monde intérieur, parfumé de bonnes choses, porte en lui l’idée future du restaurant qu’elle créera avec son mari. Elle écrira ses mémoires dans un adorable livre publié aux éditions du Carreau, Mémoire de riz, où elle raconte ses souvenirs de recettes et d’expéditions en montagne, assortis de croquis.
La cuisine
Ensemble, Nidta et Félix Robert travaillent pendant cinq ans auprès d’Alexandre Gauthier, à la Grenouillère, avant d’ouvrir Arborescence. Dans ce restaurant si personnel, entre les cépages et les régions, sous les dentelles d’oursin ou la raviole dragon, on peut y deviner quelques-uns de ces secrets venus de l’enfance.
Félix Robert vient du Nord de la France et Nidta Robert Prathum de Thaïlande. Inévitablement, la rencontre entre ces deux univers ne pouvait donner lieu qu’à d’étonnantes associations. Cuisine locale et de saison, cela va de soi, mais aussi souvenirs croisés de deux individualités aux bagages gastronomiques opposés. Le choc est grand.
On passe ainsi, en un même repas, d’une promenade en forêt française à un grand tour en mer, le tout parfumé aux agrumes et épices venus du lointain. Le voyage se termine souvent sur une cire thaïlandaise comestible dont les parfums nous embaument pendant des heures. La cuisine s’envisage ici comme une promenade qui ne se terminerait jamais, avec mille ramifications possibles – en arborescence.
Le vin
Passionnée par la conduite de la vigne et par les profonds mouvements des sous-sols, Nidta Robert a une vision géographique de la dégustation. Pour elle, les vins sont toujours la traduction liquide d’un paysage. Dans un verre, elle pressent la formation des montagnes, des crêtes et des crevasses, le flux d’une rivière ou la caresse des rayons du soleil, qu’ils soient du matin ou du soir. Outre une approche très géologique du vin, Nidta Robert en a également une perception profondément humaniste puisque pour elle, le précieux liquide porte les stigmates de celui qui l’a fait. Elle devine ainsi la méthodologie de travail du vigneron autant que sa personnalité. Une approche quasi sacrale de la sommellerie qui fait prévaloir à la carte des vins de connaisseurs, des vins d’auteurs à forte personnalité, biologiques ou non, avec toujours cette part d’étonnement et de joie d’avoir déniché la pépite bien faite.
Tous les produits, chez Arborescence, sont d’abord choisis pour leur qualité et leur proximité géographique.
L’équipe, composée de quatorze personnes avec les agents de ménage, compte sept personnes en cuisine et cinq en salle. La gestion des équipes est, pour Nidta et Félix Robert, une histoire de générosité. Créer une atmosphère émancipatrice pour chacun et chacune est essentiel. Un agent de ménage, particulièrement curieux et intéressé par la cuisine, a été formé pour devenir, en deux mois, membre du personnel de salle.
Nidta Robert n’hésite pas à transmettre son savoir œnologique dès qu’elle le peut à sa brigade pour que tous soient formés au même niveau. Ces valeurs, communiquées aux clients, sont aussi celles qui sont encouragées au sein même de l’équipe. Le service se fait auprès du public avec le plus de délicatesse et de soin possible, tout en restant discret.
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Source CP et visuels © L’Arborescence – Florian Domergue