Par Emmanuel Lupé – Rédacteur en chef – 2eme partie.
Emmanuel Renaut est un créateur. La liberté est son moteur, sa quête est l’excellence, et la découverte, sa muse. Le chef est aussi un guide. C’est avec l’âme d’un guide de haute montagne, qu’il s’attache à mener la gastronomie française à son plus haut niveau. Le chef est également un messager. La nature est une source d’inspiration aussi infinie que fragile. A travers chacune de ses compositions, le chef-messager œuvre pour sensibiliser chacun, au respect du patrimoine culinaire.
Quand on lui demande s’il est un chef écoresponsable, il sourit et répond.
« Je ne sais pas si je suis un chef écoresponsable !! En tout cas je suis responsable de mes actes. L’écoresponsabilité, c’est devenu une mode, une façon de communiquer de savoir si on respecte la nature et autre. J’ai toujours respecté la nature, c’est ma façon de vivre. Je n’ai pas besoin de crier haut et fort que je suis écoresponsable. Ici on travaille bien sûr, mais comme la plupart des grands chefs dans le monde, le circuit court, nos déchets, mais cela devient une évidence, ce n’est même pas à mettre en avant, tout le monde devrait faire cela. Ici on a été assez précurseur concrnant le concept de travailler en circuit très-très court. Avoir banni les poissons de mer pour utiliser les poissons de lacs, à avoir fait travailler des cultivateurs qui sont aux abords de l’hôtel, avoir aidé des boulangers et des jeunes à s’installer, avoir soutenu financièrement ceux qui s’occupent de cultiver nos légumes ainsi que des fromagers qui travaillent en circuit court, d’avoir fait installer des gens qui produisent nos œufs dans la région. C’est un peu notre métier et notre devoir de le faire. Je me sens pas chef écoresponsable je le vis depuis toujours et pour moi ce n’est pas un label de qualité mais juste une naturalité. »
Une odeur de haute gastronomie commence à se répandre dans toute la cuisine et l’équipe en charge du service s’agite. L’interview continue et les premiers amuses bouches sont prêts à être servis dans les chambres. Le chef demande à son bras droit en cuisine d’en faire préparer quelques-uns pour moi afin que je puisse goûter ses petits plats et après tout il est déjà 19H00 et tout le village est sous couvre-feu !
Je fais connaissance de Kristine Renaut, la maîtresse de maison, qui vient d’arriver en cuisine. Kristine est une véritable professionnelle de la gastronomie et de l’hôtellerie. Alors qu’elle officie au sein du prestigieux établissement Claridge de Londres, un nouveau chef est annoncé, il s’appelle Emmanuel Renaut. Entre eux, le coup de foudre est immédiat. Les deux amoureux se laissent aller à quelques rêveries de gosse, un établissement rien qu’à eux, une table d’exception dans un cadre authentique. Un an plus tard, le rêve s’appelle Flocons de Sel.
La naissance du Flocons de Sel
En décembre 1997, Emmanuel Renaut visite un établissement situé en plein centre historique de Megève qui offre un cadre intimiste et une terrasse qui dissimule toute sa superbe sous 1 mètre de neige. L’adresse s’impose comme une évidence. C’est ici qu’il composera, avec l’âme d’un aubergiste, une cuisine nouvelle. Au printemps 1998, après quelques travaux d’aménagement, le restaurant dévoile son nom de baptême « Flocons de Sel », symbole de l’émotion qui anime le Chef et des nombreux défis qui l’attendent sur la route vers les plus hauts sommets.
Le succès est au rendez-vous et dès 2001, le Flocons de Sel décroche sa première étoile. Bien plus qu’un créateur de recettes, Emmanuel aborde son métier comme un messager. La transmission est au cœur de sa mission. Respecter la nature, respecter la terre, l’animal, l’homme, tels sont les messages qu’il saupoudre sur chacune de ses créations.
En 2004, le passeur de messages est admis au rang de Meilleur Ouvrier de France. En 2006, Le Flocons de Sel décroche sa seconde étoile. Un an plus tard, les murs de l’établissement deviennent trop étroits, il faut engager le tome 2 de l’aventure Flocons de Sel.
Sur les hauteurs de Megève, Emmanuel Renaut dirige la métamorphose d’un chalet tandis que deux autres sortent de terre, comme pour lui tenir compagnie. Route du Leutaz, le 25 novembre 2008, le nouveau Flocons de Sel ouvre ses portes. En 2012, le chef décroche la troisième étoile.
La cuisine d’Emmanuel Renaut
Je vois que le service s’accélère et que le chef n’a plus trop le temps de me parler et je lui pose ma dernière question.
Qu’est ce qui définit la cuisine d’Emmanuel Renaut aujourd’hui ?
« Ma cuisine est en prise direct avec la nature. Je me suis installé au milieu des prés et des champs et plus ça va dans ma démarche, c’est d’être encore plus radical dans l’émotion de produit. Alors ce ne sera peut-être pas pour tout le monde car il y a des personnes qui ont besoin d’avoir des valeurs et des repères. Je trouve que plus ça va, plus j’arrive à me libérer de tout ce qui peut y avoir d’ostentatoire ou autre dans la cuisine et d’arriver à l’essentiel. J’ai la chance d’avoir une clientèle d’habitués depuis bientôt 25 ans et ces gens-là sont fidèles et me laissent faire ce dont j’ai envie. Ils sont réceptifs parce qu’ils ont appris mon style de cuisine et qu’elle évolue au fur et à mesure. Je pense que l’on va dans la bonne direction pour être de mieux en mieux à tous niveaux. Que ce soit au niveau gustatif, façon de vie, façon de faire et puis aussi avec les équipes, parce qu’il n’y a pas que la cuisine, je pense que c’est un environnement, l’important c’est la façon de vivre avec son environnement, il n’y a pas que l’assiette. »
Il est presque 21H00 et je dois saluer le chef et ses équipes pour ce merveilleux moment. Nul doute que ce chef incroyable n’a pas fini de nous étonner. Il me faut maintenant rentrer au centre de Megève par la fameuse petite route serpentée du Leutaz qui, depuis mon arrivée, s’est revêtue de 10 centimètres de neige !!
Lire la première partie de l’article ici.
Pour réserver au Flocons de Sel cliquez ici.
Remerciements à Jessica Bartoli de la Direction du Tourisme et la Régie du Tourisme de Megève pour son assistance.
Photos © fournies gracieusement par Flocons de Sel et par l’Office du tourisme de Megève.