Voici notre sélection hebdomadaire de nouvelles gastronomiques provenant des Guides Lebey.
Le bistrot de la semaine : Divine Providence (18è)
Entre les outsiders de Top Truc nouvellement installés et ceux qui se prennent pour des génies créatifs (Des noms…. Non!), forts d’un cursus chez les Grands, on préfère les discrets, qui n’ont rien de tâcherons mais qui aiment bien leur boulot. Prenez par exemple ce Meha, posé ici depuis un an et demi, et que le tamis des nouveautés n’a pas retenu, on ne sait pas vraiment pourquoi. Murs clairs, sièges et suspensions façon osier (ou bambous), assiettes aux murs et carrelages lambris, le cadre, qui ne la ramène pas, a le mérite de la luminosité. Au menu déjeuner, cadeau, entre deux entrées-plats-desserts, il y a de la providence dans l’air: macaronis farcis aux épinards en chaud-froid par le contrepoint d’une stracciatella bien crémeuse (ou thon rouge snacké, miso caramélisé et avocat); cabillaud en parallélépipède mariné légèrement au sel afin qu’il retrouve une saveur iodée, sur un pressé d’aubergines escorté d’un nuage émulsionné de fumet de homard (ou entrecôte au millefeuille de pommes de terre, avec un petit luxe de jus de veau, bravo) et gentil dessert estival, salade de fruits frais et sorbet citron. Déjà bien réveillé au déjeuner, le chef, Issam Ayari, y va à fond au dîner, alignant ceviche de dorade et asperges, ravioles de gambas à la bisque de homard, ris de veau croustillant, céleri rôti et artichaut, tout en laissant s’exprimer une verve végétale, faite aussi de petits pois, fenouil, blette, etc. du meilleur effet.
Notre repas : macaronis farcis aux épinards, stracciatella fumée et coulis de tomate ; filet de cabillaud, pressé d’aubergines, piperade et betteraves mandolinées ; fraises à la menthe poivrée, petit sablé maison, glace aux fraises et chantilly bien grasse (29,50 euros avec un verre de côtes-du-ventoux blanc Domaine de Fondrèche).
Vin : Barret en rhône, Sébille en chinon… sélection assurée par Julien, ancien des Arlots.
Pain : campagne moelleux de Gana (rue Duhesme – 75018). Café : Richard.
Meha 35, rue Ramey – 75018 Métro : Marcadet-Poissonniers et Château Rouge www.meha.paris .
Rendez-vous : arts culinaires
Faire se rencontrer créations d’artistes et plats imaginées par des chefs qui sont eux aussi des artistes à leur manière … Telle est l’ambition de cette manifestation qui, pendant plusieurs jours, invite à déguster un plat inspiré par une œuvre d’art exposé dans le même restaurant. Quelques duos s’annoncent prometteurs : le plasticien Raphaël Zarka et le chef Martin Gomes-Léal à l’Archestrate (34, rue de Bourgogne) ; l’artiste pluridisciplinaire Marina de Caro au restaurant Nosso d’Alessandra Montagne (22, promenade Claude Lévy-Strauss) ; les compositions de Théodore Dakpogan à la Villa 9 Trois du chef Camille Saint-M’Leux (Montreuil) ; le sculpteur Loris Cecchini au restaurant Habile d’Eric Fontanini (16, rue de Lancry) ; ou Thu Van Tran au restaurant Clarence de Christophe Pelé (31, avenue Franklin Roosevelt).
En pratique : Night-Fall Paris du 24 juin au 9 juillet ; plus d’infos sur www.artgeneve.ch
L’Italien de la semaine : comme à Cagliari (11è)
C’est au bout de la longue rue Sedaine que se situe ce repaire sarde qui ne paie pas de mine. Le resto de poche possède sa terrasse, adéquate en ce jour de juin aux faux airs de 15 août tant le quartier se devine calme. La chaleur, les odeurs, le territoire italien est bien là, ce que confirme la carte avec pastas à gogo proposées au déjeuner. Elles font toutes envie : variées, faites maison, à la cuisson parfaite… On ne saurait trop vous conseiller les raviolis sardes, spécialités de la maison, farcis de purée de pommes de terre à la menthe et pecorino, recouverts d’une sauce tomate – plutôt liquide comme une soupe – avec tomates cerises et parsemés de copeaux de parmesan, cuits à la minute. Le restaurant se remplit, l’ambiance monte d’un cran, jusqu’à se laisse bercer par cette touffeur, le murmure de la ville et la playlist branchée sur Radio Nostalgie… Le service toujours alerte et souriant propose la carte des dolci avec un tiramisu, dense, peut-être un peu trop, jusqu’à manquer de moelleux. Le menu du déjeuner facturé à 19 euros n’a pas d’équivalent dans le quartier. Et la carte du soir donne la part belle aux poissons, que le chef adore cuisiner. On serait bien resté l’après-midi à discuter, légèrement engourdi par ce repas copieux, la chaleur et la musique en fond… comme à l’ombre d’une place à Cagliari. Séverine Lefebvre
Notre repas : salade d’artichauts, tomates, parmesan ; raviolis farcis à la pomme de terre, menthe, pecorino, sauce tomate ; tiramisu (29 euros avec un verre de 10 Crio, Frascati, San Marco)
En pratique : fermé le dimanche et lundi ; formule à 15 euros et menu à 19 euros au déjeuner.
Garum 64, rue Sedaine – 75011 – Métro : Voltaire
Le Ruinart de Monsieur Paul
Faire un grand ménage a du bon. En 2021, alors qu’il inventorie le cellier du restaurant Paul Bocuse à Lyon, Maxime Valéry, jeune sommelier de la table mythique, découvre dix-huit bouteilles de champagne Ruinart. Millésime 1926. C’est l’année de naissance du « cuisinier du siècle » et il aimait la collectionner et la servir. Pour la plus ancienne des maisons de Champagne, c’est une découverte incroyable. Dépouillée au cours de la Seconde Guerre mondiale, elle retrouve une part de son histoire. Pour Frédéric Panaïotis, son chef de cave, c’est un témoignage inestimable. « Dès que j’ai appris l’existence de ces flacons, je me suis rendu sur place pour les voir ».
La surprise est encore plus grande devant l’état de conservation de ces bouteilles presque centenaires. Étiquette peu abimée, coiffe impeccable, bouchon en place, l’extérieur ne fait pas son âge, en dehors de quelques mentions d’un autre temps. Dans le verre, l’étonnement laisse place à l’émotion. Très légère effervescence, arômes nobles de fruits mûrs et d’agrumes confits, de la fraîcheur, du style. « De bons vins mais pas de grands vins », peut-on lire dans les archives de la maison à propos de cette récolte 1926. Sa dégustation est pourtant une leçon d’humilité pour ceux qui jugent parfois – nous compris – de leur potentiel. En retrouvant son plus vieux millésime connu, la maison Ruinart rappelle à tous que la qualité de ses champagnes n’est pas un concept moderne. Ce savoir-faire fêtera bientôt trois siècles d’existence. Dans ce 1926, après un siècle à attendre son heure, il n’a pas déçu. Aujourd’hui, dans ses cuvées millésimées, il porte une promesse au moins égale, sinon supérieure.
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