La capitale de l’Aveyron est devenue en quelques années une étape incontournable du voyage gourmand. Sans aucun doute depuis l’installation des Bras qui ont donné leurs chances à de nombreux producteurs ou artisans et formé une génération de chefs sublimant la nature grâce à une technique irréprochable. Notre coup de cœur de l’été va à un Vénitien passé par Laguiole et établi au cœur de Rodez.
Venise – Rodez
Dans un quartier récent que relie le viaduc de Bourran à la vieille ville et au musée Soulages tout proche, le restaurant de Vasco Baldisserotto se singularise par un design épuré dans lequel excelle l’Italie. L’espace apporte aux tables le confort quant les suspensions en verre de Murano ou les arts de la table soignent l’accueil. Ce chef, Vénitien d’origine, a été formé par quelques belles dynasties issues des deux côtés des Alpes, les Marchesi, Alajmo ou Bras. De son passage au restaurant du Suquet ou à la brasserie Bras du musée Soulages, il cultive un attachement sans faille à l’Aubrac. Ou comment l’« école du gargouillou » irradie à jamais dans le processus de création que ponctuent chez lui les nombreuses séances de cueillette sauvage. Ce bi-national de la gastronomie se nourrit de patrimoine et de culture. Ses plats s’inscrivent dans des leçons de géographie associant chaque produit à un sourcing pointilleux comme d’histoire donnant leurs chances à des plats de grande tradition à la présentation bien en phase avec l’époque.
Les raviolis s’accompagnent d’une sauce cardinal devenue si rare, jus court de homard mouillé au fumet de homard – sans béchamel à la différence de la recette d’Escoffier – et recouverts en saison des lamelles de truffe. Tout aussi essentiel, le local estofinado repose sur une polenta vénitienne, à savoir sans lait ni crème, aérienne et à la surface croustillante. Impressionne également la joue de porc cuite à l’ancienne, assaisonnée, colorée, déglacée avec du bon vin rouge (point essentiel selon le chef), mouillée avec un jus long avant un braisage à couvert deux heures durant. À ne pas manquer non plus, le foie de veau à la vénitienne préparé avec de l’érythrone ou, durant la période, le gibier à plume. Cette leçon de cuisine déroule son faste au long des différents menus qui changent chaque semaine. La fin de repas reste magistrale, fraîche association entre le fenouil et l’orange sanguine ou consécration du classique millefeuille réalisé à la perfection et réveillé par une onctueuse crème namelaka et un puissant coulis de poivrons doux. Service d’une grande gentillesse et professionnel.
Notre repas : snacks (une succession de bouchées, est-ce bien utile ?) ; « Venise-Rodez », estofinado, lard d’ici, polenta ; joue de porc à l’ancienne, vinaigrette iodée couteau, verjus ; millefeuille abricot, lavande et poivron doux (52 euros avec un verre de Colosi Salina Bianco)
Vin : courte mais sérieuse sélection partagée entre la France et l’Italie, tarifs restés accessibles, quelques bouteilles viennent de la cave de Sergio Calderon (Maison Bras)
Fromages : intelligent assortiment entre vaches, brebis et chèvres de Fabienne (Terres Fromagères)
Pain : gressini et focaccia maison servie avec une huile d’olive des Pouilles (affiorato, Galantino), et pain de son et de seigle (Maxime)
Café : Fleuriot servi avec les exceptionnels chocolats maturés de Lucifèves d’Aubrac (voir ci-dessous)
En pratique : fermé le dimanche soir, le lundi et le mardi ; menus à 40, 65 et 75 euros ; supplément accords mets et vins 30 euros
Restaurant Opéra – 1, rue d’Athènes – 12000 Rodez – www.opera-rodez.fr
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Café Bras au musée Soulage
Rarement musée et restauration n’ont fait aussi bien cause commune. Il faut visiter le musée Soulages et découvrir l’outre noir du peintre avant de s’attabler à la table des Bras. Ou l’inverse. Le comptoir et le restaurant témoignent de l’intérêt qu’on toujours porté Michel et Sébastien à l’architecture comme aux arts. Le chef Christophe Chaillou propose ici une cuisine de « l’instant et du marché » qui laisse la part belle aux légumes et herbes de saison. Le menu du jour tient de la tentation gourmande d’autant qu’il se termine par des desserts de haute volée. Le sucré constitue l’autre héritage ou patrimoine des Bras. Il y a les incontournables « trois », « cinq », « dix » et « quinze », chacun reprenant la forme des parallélépipèdes correspondant aux quatre différents espaces du musée.
À chaque exposition temporaire, les Bras ont également pris l’habitude de mettre au point une création : pour « Soulages ultime » actuellement à l’affiche, le dessert réunit trois éléments qu’affectionnait le peintre, le fromage de Laguiole, la gentiane et la fouace. Enfin, tous les jours, deux nouvelles tartes cuites au moment sur la base d’une recette de pâte ancienne proche du feuilletage sont proposées accompagnées d’une crème glacée. Sans oublier le simple mais irrésistible petit beurre au café dont de nombreux visiteurs font le plein à chaque visite.
Comptoir ouvert au déjeuner (12h à 14h) et au goûter (15h30 à 18h) ; restaurant avec menu à 43 euros ouvert au déjeuner (12h à 13h30) et au dîner uniquement le samedi soir ; fermeture le lundi en août et également le mardi le reste de l’année
Jardin du Foirail – 12000 Rodez – www.cafebras.fr
Artisan du fruit
Le cuisinier pâtissier Bernard Salinier possède une véritable caverne d’Ali Baba où de nombreux chefs et passionnés aiment venir s’approvisionner. Le fruit dans sa plus pure expression constitue son leitmotiv. Sur les étagères toutes bien garnies, s’alignent les pots de confiture avec des recettes souvent originales comme abricot praliné, cerise noir safran ou coing pain d’épices, des sirops de gentiane, de mandarine ou de thé d’aubrac, des fruits à la liqueur comme les raisins, les cerises ou sa recette d’ananas punch. Dans un registre sucré salé, les chutneys occupent également une bonne place comme le citron confit à l’huile d’olive ou les figuettes à l’aigre-doux de pomme. On aimerait tout citer tant l’adresse regorge de découvertes, le vinaigre de tomate ou celui de vin au brou de noix, le confit d’endives à l’ail caramélisé, le fondant de mandarine à la vanille ou la sauce tomate cèpes genièvre. Les produits qu’il cuisine sont naturels, sans conservateur ni colorant.
3, rue Corbières – 12000 Rodez – www.artisandufruit.fr
Lucifèves d’Aubrac
En 2020, ils décident de quitter le confort de vie urbain, s’installent dans l’Aubrac et apprennent un nouveau métier, chocolatier. Laëtitia et Cédric maîtrisent désormais toutes les étapes de la transformation, tri des fèves, torréfaction, vannage, conchage… Avec le souci permanent de l’approvisionnement, Guatemala, Venezuela, Colombie, Congo ou Inde pour les fèves, et l’Aubrac pour tout autre entrant. Ils ont surtout l’idée de faire maturer les chocolats au minimum pendant trois mois pour permettre aux arômes de se développer et de s’affiner. Dans l’atelier, des blocs de 10 kg se découvrent placés dans des papiers poreux en parfaite osmose avec la pureté de l’air de leurs montagnes. Avec, à la clé, une texture qui, selon les origines, évolue : grainée comme des grains de riz soufflé ou stratifiée comme des bois cassés. L’astringence et l’acidité disparues laissent la place à des saveurs parfois florales, fruitées, voire épicées. Ces nouveaux maîtres chocolatiers mettent au point également une recette à base de lait de brebis associé à des fèves de Sao Tomé et à un taux de sucre réduit. Notes d’amande ou de fève de tonka prennent subtilement le dessus en fin de bouche quand la note lactée exacerbée de la brebis donne à la dégustation un côté goûter d’enfance. Une gourmandise inédite, irrésistible, comme d’ailleurs toute la collection de tablettes.
Lucifèves d’Aubrac Valesques – 12500 Castelnau-de-Mandailles – www.lucifevesdaubrac.fr
Sur le marché de Rodez
Si vous êtes lève-tôt, vous aurez la chance d’y rencontrer de nombreux chefs ruthénois qui aiment s’y retrouver et partager leurs bonnes adresses. Parmi les artisans ou producteurs, des noms reviennent souvent, Fabienne des Terres Fromagères, Yannick Colombie producteur de fruits à Lizac, mais aussi Bernard et Laurence, Gaël, Sandrine, Sylvain, Charlotte, David … Autre prénom à connaître, Nicolas de la truite d’Aubrac qui propose des truites bio élevées sur le lac de Sarrans.
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Article écrit par Pierre-Yves Chupin transmis gracieusement par Guides Lebey – Source et visuels © Guides Lebey , Tourisme Aveyron et DR.