La crise sanitaire a douché les espoirs, quelques centaines seulement se sont déplacés et il a fallu expédier dans les grandes métropoles, Hong-Kong, New-York, Shanghaï, Londres, Bruxelles ou Francfort, des échantillons de ces grands crus.La crise sanitaire a douché les espoirs, quelques centaines seulement se sont déplacés et il a fallu expédier dans les grandes métropoles, Hong-Kong, New-York, Shanghaï, Londres, Bruxelles ou Francfort, des échantillons de ces grands crus.
Frappés pour la deuxième année par la crise du Covid, les grands crus bordelais ont dû redoubler d’ingéniosité pour la semaine cruciale des dégustations de leurs primeurs 2020, en expédiant dans le monde entier, sous haute sécurité, des échantillons de ce millésime que la profession juge déjà exceptionnel.
Habituellement, 7 à 8.000 négociants, courtiers, journalistes venus d’Asie, d’Europe et des Etats-Unis, affluent dans les vignobles bordelais pour cette semaine, organisée cette année du 26 au 29 avril.
Mais comme en 2020, la crise sanitaire a douché les espoirs, quelques centaines seulement se sont déplacés et il a fallu expédier dans les grandes métropoles, Hong-Kong, New-York, Shanghaï, Londres, Bruxelles ou Francfort, des échantillons de ces grands crus.
Selon le modèle unique des primeurs, ces vins seront commercialisés entre début mai et mi-juin, mais livrés seulement dans 18 à 24 mois. Un système qui permet aux acheteurs de bénéficier de prix avantageux, et aux producteurs d’avoir de la trésorerie et d’éviter les stocks alors que ces vins sont généralement consommables plusieurs années plus tard.
Dans les châteaux, l’expérience de l’an dernier a permis de peaufiner la logistique pour ces expéditions.
Une opération à haut risque pour des vins en cours d’élevage, instables et fragiles, qui doivent voyager avec un luxe de précautions.
Au château Angélus, Premier grand cru classé A de Saint-Emilion, les vins sont ainsi expédiés par avions dans de petits flacons, des « Wit » (Wine in Tube) contenant l’équivalent de deux verres, et qui maintiennent les vins à pression et température constantes. Ceux-ci devront être dégustés « dans les 15 jours maximum », soulignent Stéphanie de Bouärd-Rivoal, PDG du château, et son père Hubert de Bouärd de Laforest.
Pour pallier le manque de visiteurs, les visio-conférences sont devenues monnaie courante. « D’habitude, on accueille 3.000 personnes par semaine, là seulement 230 », souligne Marion Millaire, responsable de l’accueil et de l’événementiel au domaine. Mais du 15 au 29 avril plus de 200 dégustations via zoom ont été organisées, créant une certaine effervescence dans l’un des joyaux de Saint-Emilion.
Les propriétaires du château se démultiplient d’une salle à l’autre, pour saluer à distance leurs potentiels acheteurs.
Pour Stéphanie de Bouärd-Rivoal, le jeu en vaut la chandelle car le millésime 2020 d’Angelus est « absolument fantastique », révélant « des notes florales et de violette » inédites. L’aboutissement, selon elle, d’un travail de plusieurs années pour faire évoluer ce vin d’exception vers plus « d’élégance ».
Embellie en vue?
Dans le Pessac-Léognan, on s’est aussi décarcassé. Le 26 avril, près de 500 visiteurs étaient accueillis, cette fois-ci en présentiel, pour des dégustations dans quatre châteaux de l’appellation. « C’est important de conserver ce lien d’autant plus qu’on a un très grand millésime », estime Laurent Cisneros, ex-footballeur de D2 au passé d’entrepreneur, qui a repris il y a dix ans le Château de Rouillac, alors en déshérence.
L’Union des Grands Crus de Bordeaux (UGCB) s’est quant à elle chargé d’expédier, par avions réfrigérés, une sélection de ses 131 membres à travers le monde.
En dépit de la crise du Covid et de la sécheresse de l’été 2020 qui a réduit en volume la production, l’UGCB, entrevoit une embellie. Son président, Ronan Laborde, vante un millésime avec « des surprises, de grandes réussites, des vins qui ont un éclat aromatique exceptionnel ». Selon lui, « le faible rendement 2020, probablement en baisse de 10 à 15%, pourra générer une inflation des prix mais qui restera « raisonnée ».
L’institut des sciences de la vie et du vin (ISVV) de l’université de Bordeaux voit également venir « des vins blancs secs savoureux, des vins liquoreux rares mais miraculés et des vins rouges structurés et équilibrés », tandis que sur le plan économique le Comité interprofessionnel des Vins de Bordeaux constate que « depuis quelques mois, les indicateurs sont passés au vert », comme « la suspension des taxes Trump aux Etats-Unis », la sortie de la Chine de l’épidémie de Covid avec une longueur d’avance et « la perspective d’une réouverture des restaurants » en France.
Source ETX Studio – Photo © Mehdi Fedouach / AFP.