Nous souhaitons vous parler d’un domaine qui ne fait pas les choses comme les autres et qui mérite d’être mis en avant aujourd’hui et d’être montré en exemple !
Fondée en 1204 par l’ordre des Templiers, la Commanderie de Peyrassol vit aujourd’hui une nouvelle étape de son histoire millénaire. Abritant de son cocon protecteur le vignoble Château Peyrassol, celui-ci est officiellement labellisé biologique à l’occasion du millésime 2022.
À l’heure où la prise de conscience des enjeux écologiques ne suffit plus, le domaine s’oriente ainsi vers davantage de responsabilité. Comme une histoire contemplant son reflet, le vignoble se tourne aujourd’hui vers des modes de culture ancestraux, loin des apports chimiques promus au XXe siècle, y ajoutant la connaissance acquise et la modernité du monde agricole contemporain. Un retour aux sources, en somme.
« Lorsque j’ai découvert la Commanderie de Peyrassol en 2001, ce fut le coup de foudre. Ancré dans l’histoire, perdu dans les bois, difficile d’accès, et, en même temps ouvert sur l’horizon, ce domaine avait tout pour me séduire, » raconte Philippe Austruy. « Avec ses restanques effondrées, sa cave vieillotte et ses bâtiments qui ne demandaient qu’à revivre, j’y ai vu un vaste projet dans lequel exprimer tout mon amour de la terre, de l’authenticité, de la nature. J’ai pu y mêler mes deux plus grandes passions, le vin et l’art. 850 hectares de bois et de garrigues, 92 hectares de vignes, ce morceau de Provence confère aussi une grande responsabilité. Le transmettre intact aux futures générations et contribuer à laisser s’y épanouir toutes les conditions d’une biodiversité préservée s’est imposé à moi. Et ce sera l’œuvre d’une vie. Bien-sûr, nous avons toujours travaillé dans le respect de l’environnement mais j’ai souhaité passer à un stade plus engageant. Avec notamment un vignoble cultivé selon les principes de l’agriculture biologique, des jardins conservatoires de la faune et de la flore locales, une ferme biologique, des restaurants privilégiant les produits locaux et les circuits courts. La Commanderie de Peyrassol est le jardin d’Eden dont nous rêvons tous. »
Entrez dans l’expérience…
À l’aune de nos panoramas urbains, il n’est pas si simple de prendre la mesure des 850 hectares d’un seul tenant du domaine. Où que nos regards se posent, on ne peut distinguer ses frontières. À l’horizon, la ligne bleuie du massif des Maures découpe le ciel. Autour de nous, vallons et collines se succèdent tandis que s’alternent bois, garrigues, oliviers et vignes. L’amplitude alliée à l’isolement font de cette propriété un lieu qui se mérite. Pour s’y rendre, il faut emprunter la route qui serpente entre bois et vignes depuis la mythique Nationale 7. Suivant les reliefs et soulignant les paysages, cette route aussi chaotique qu’étroite nous conduit au cœur de la Commanderie de Peyrassol. On ne s’y rend pas au hasard d’une balade improvisée, on y vient avec la promesse de vivre une expérience sans pareille. L’isolement du domaine accentue la capacité de préservation de sa nature et cultive ainsi une certaine part de mystère…
Une biodiversité savamment préservée
Dans la densité offerte par l’écosystème naturel du domaine, la faune y trouve refuge. Perchée à 300 mètres d’altitude, la forêt de la Commanderie de Peyrassol s’étend sur des terres argilo-calcaires. Elle est habitée par des chênes blancs, plusieurs fois centenaires, qui imposent leur carrure tortueuse ainsi que par des pins (parasols, pin d’Alep, pins maritimes) qui cisèlent le bleu du ciel provençal de leur silhouette graphique. Au cœur de cet écrin naturel s’érige une forêt de cèdres de l’Atlas, aussi sublime qu’imposante. Érables, charmes, oliviers et cormiers se mêlent au maquis provençal, riche et diverse : coquelicots, cystes, églantiers, fragons, genévriers, épines du christ, filaires…
Les bois sont arpentés par un grand nombre d’espèces animales dont certaines, protégées, sont particulièrement précieuses par leur rareté. La Tortue d’Hermann, menacée d’extinction et présente uniquement en Corse et dans le Var, la genette, le criquet hérisson ou encore le pic épeichette peuplent le domaine. Sans compter le hibou grand-duc à l’altière silhouette ou quelques canis lupus qui divaguent dans cette nature préservée. Mettant en avant le particularisme de notre biodiversité, l’Inventaire National du Patrimoine Naturel a qualifié notre écosystème de zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique. Symboles de cette biodiversité exceptionnelle, les papillons citron de Provence et machaon font vibrer les paysages de leurs couleurs chatoyantes. Un peu plus loin, à l’orée de la parcelle dite « Clos de Peyrassol », où sont assemblées les cuvées les plus prestigieuses du vignoble, les abeilles bourdonnent autour des ruches qui y sont installées, véritable marqueur de qualité environnementale. Les moutons pâturent dans les vignes, les vaches dans les forêts, assurant une fertilisation naturelle et un nettoyage des espaces.
Le cycle de la nature est préservé, les arbres morts se transforment en abri pour de nombreuses espèces, le bois en décomposition emmagasine une grande quantité d’eau et fabrique un humus humide, permettant la bonne gestion des sécheresses. Cet écosystème forestier constitue un bénéfice considérable pour la culture de nos vignes. En effet, les arbres possèdent un stock de carbone dans leur bois et plus en profondeur, par la décomposition de leurs fines racines, années après années. Ils protègent également les cultures, brisent le vent, amoindrissent l’impact des pluies violentes et les insolations excessives. En enfonçant leurs racines dans le sol, les arbres en augmentent la profondeur exploitable et favorisent la remontée capillaire de l’eau profonde tout en permettant aux pluies de mieux s’infiltrer pour recharger la nappe. De fait, malgré la longue période de sécheresse connue dans l’année, le vignoble Château Peyrassol a pu se réguler naturellement en apport hydrique.
La ferme et le potager bio
Dans la dynamique de conversion biologique du vignoble Château Peyrassol, une nouvelle aventure est née en 2020, par la création d’une ferme biologique. Située à mi-chemin entre le cœur de la Commanderie et les chambres d’hôtes de La Rouvière, surplombant la parcelle du Clos, sa production alimente les cuisines du Bistrot de Lou et de Chez Jeannette. De la terre à l’assiette, fruits, légumes, volailles, ovins, caprins et porcs sont élevés en plein air et transformés par des artisans locaux avant d’être proposés au menu des tables du domaine, en fonction des saisons.
Sur une surface de 5000 m2, le maraîchage s’harmonise avec l’influence de la lune, de manière à offrir des fruits et légumes de saison en abondance. Supervisé par Fouad Essoualeh, chef des cultures de la vigne, le potager aligne, avec une poésie des plus végétales, les perches supportant tomates, haricots, rangées de salades et autres herbes aromatiques. Tomates San Marzano, piment Black Pearl, courgettes Amalthée, courges longue de Nice, pommes de terre Mona Lisa, cébette, basilic, persil géant d’Italie, coriandre, roquette de Provence; toutes les variétés cultivées s’adaptent parfaitement au terroir et s’ancrent dans la gastronomie locale.
Sous la houlette d’une équipe recrutée spécifiquement, plus de trente hectares sont réservés à un élevage respectueux des animaux et de leur développement naturel. Enclos et abris boisés permettent à chaque espèce de se déplacer librement. Les poules Harco et les poules rousses pondent quotidiennement des œufs servis au petit déjeuner et au menu des différents restaurants. Grâce à une alimentation biologique et un accompagnement sanitaire strict, les poules de chair, canard de barbarie et porc noir de Bigorre offrent des chairs goûteuses et saines. Ils donnent ainsi toute leur personnalité aux plats gourmands qui évoluent au fil des saisons. Prochainement, les chèvres laitières provençales fourniront le domaine en fromage frais.
Les jardins remarquables
En plus des vignes, vergers et potagers, le domaine s’enorgueillit de jardins labellisés « remarquables ». Ciselés avec soin, ils sont façonnés au fil des saisons, pour le plaisir des yeux et des sens. Entourant la bastide du propriétaire, Philippe Austruy, ces jardins de style méditerranéens s’étirent jusqu’à La Rouvière et accompagnent les œuvres d’art jusque dans les sous-bois des bosquets du domaine.
Sous la direction de la paysagiste Gaële Bazennerye, une équipe de jardiniers dédiés veille dans un respect rigoureux de l’environnement, sur ces paysages magnifi és. Pour la production des végétaux, le choix du local est privilégié. De la pépinière de La Libre située à Besse-sur-Issole, au paillage de chêne-liège de la plaine du Var, jusqu’à nos propres bois coupés qui servent à fabriquer des bancs et nichoirs. Tout est mis en œuvre pour limiter l’arrosage : enrichissement des sols, paillage, restriction des gazons, diminution des tontes, soufflage des feuilles, utilisation du réseau de goutte à goutte seulement en périodes extrêmes ; autant de pratiques qui permettent de préserver la ressource essentielle qu’est l’eau.
Logé sur le versant du centre d’art, dans les sous-bois, autour de l’œuvre Giant Multiple Mushroom de Carsten Höller, est né en 2022 un laboratoire d’observation de la résistance des plantes au changement climatique. Années après années, la collection de plantes du domaine s’enrichit et se diversifie. Elle est rendue accessible aux visiteurs grâce à un étiquetage pédagogique.
Alors que les jardins de buis se font de plus en plus rares en France, ceux de la bastide font la fierté des jardiniers, qui y accordent une attention de tous les instants. L’installation de nichoirs à chauve-souris et autres petits oiseaux (mésange bleue, pinson des bois, rouge queue) qui s’installent plus volontiers dans les lieux fait barrage à la prolifération de la pyrale du buis, cette chenille prédatrice qui dévore les feuilles de buis. À l’ombre des mûriers, la cour nord du domaine est bordée de rosiers, clématites et d’alcea rosea.
Au fil de l’eau vive, les jardins s’étagent en restanques, unissant les vergers d’oliviers aux champs de lavande. Après avoir été transformé, l’ancien potager est désormais voué aux fleurs à bouquets : roses, lys, dahlias, pivoines, cosmos, gypsophiles, hémérocalles, scabieuses, zinnias… Le carré de fleurs comestibles, les plantes aromatiques et la collection de basilic et menthe inspirent la cuisine du restaurant Chez Jeannette.
La partie 2 sera publiée demain.
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Source et visuels © Château Peyrassol